Jean-Gabriel PELTIER,
Journaliste français (1760 - 1825)

Jean-Gabriel PELTIER, est né le 21 octobre 1760 à Gonnord (devenu Valanjou) dans le Maine-et-Loire, et non à Nantes comme le mentionne le Larousse, il faut dire que les frères Peltier (Jean-Gabriel et Marie-Etienne, le corsaire) entretenaient l'équivoque pour mieux affirmer qu'ils étaient Bretons.

Il fit ses études au collège St Clément chez les oratoriens, c'était encore un des collèges les plus réputés de Nantes, où l'on enseignait particulièrement le français et l'histoire, à l'Oratoire les esprits étaient tout près à accueillir les idées nouvelles, là se côtoyaient les enfants des meilleures familles de Nantes et des créoles d'Amériques. Son éducation fut strictement surveillée par son père, ce qui lui faisait dire plus tard: "Mon père me fit devenir vieux à force d'études lorsque j'étais jeune", la suite prouvera que cet état n'était pas irréversible.
Jean-Gabriel indique qu'il a fini ses études à Paris, à Louis-le-Grand, rien n'est moins sur...
Il commença jeune dans les bureaux d'un financier à Paris, en 1785 son père lui fournit les capitaux nécessaires pour fonder une banque en association avec un autre nantais Etienne Carrier de Montieu. Deux ans plus tard c'était la déconfiture... ils étaient entraînés par la faillite de Baudard de Saint-James (1), pourtant trésorier de la marine. Ce désastre n'était qu'un parmi tant d'autres à cette époque agitée, Jean-Gabriel, plus tard, en imputa la responsabilité à son associé qui se serait fait gruger pendant que lui-même était à Saint-Domingue occupé à ses affaires et essayant de récupérer des créances de Baudard de Saint-James. Bien que son séjour aux îles fût court, il trouva le moyen de faire banqueroute, cette fois-ci sans l'aide de son associé...

De retour à Paris, il y mena grand train de vie: 3 logements, 2 femmes, il passait les nuits dans les maisons de jeux. Mais la politique s'empare de lui, c'est la période de la convocation des Etats-Généraux. Il s'enflamme pour les idées nouvelles, assidu des réunions du Palais-Royal, il fait des pétitions au côté de Camille Desmoulins.


Motion de Camille Desmoulins au Palais Egalité - Levacher sculpteur

Camille Desmoulins


Il semble qu'il ait participé à la prise de la Bastille. Il incorpore, avec le grade de Grenadier, la Garde Nationale du district des Filles-Saint-Thomas (cela ne s'invente pas), ce bataillon était surtout composé de banquiers et d'agents de banque.

Dès le mois d'août 1789 il prend ses distances avec les événements, publie un ouvrage anonyme Sauvez-nous ou sauvez-vous, qui s'adressait aux membres de l'Assemblée Nationale, c'était un spirituel persiflage des prétentions de l'Assemblée à la science universelle. Vite découvert, il décoche deux nouveaux pamphlets la Trompette du jugement le 1 septembre et le 22 Coup d'équinoxe. Son admiration devient plus restrictive, il croit encore en Necker et La Fayette. Prémonition, il évoque "
le nuage de sang qui nous menace..." Le 7 octobre il recommence avec le Coup d'équinoxe d'Octobre 1789, puis Domine salvum fact regem où il dénonce la cabale qui voulait faire du Duc d'Orléans le lieutenant-général du royaume et de Mirabeau le Maire de Paris. Dans la même veine liturgique, sur le même sujet il publie Pange lingua.

Il disait de lui: "Je connus autrefois la banque et le commerce, j'étais familier avec un grand livre avant de l'être avec un journal..." Ainsi le 2 novembre 1789, paraît
les Actes des Apôtres (2), un étrange titre pour ce qui va être considéré comme l'ancêtre des journaux anti-parlementaires. Dès sa parution c'est un succès de curiosité, d'autres journaux vont s'inspirer de son titre. Les 4 principaux rédacteurs: Rivarol, Champcenetz , Mirabeau cadet et Le Peltier vont faire assaut de panégyriques ironiques, calembours, épigrammes et parodies des auteurs classiques. Ses anciens amis: Necker, Sieyès, Bailly et la Fayette, comme les Jacobins vont devenir leurs cibles, mais aussi les femmes pour les opinions de leurs maris ! Les articles étaient souvent rédigés au cours de dîners où chacun se surpassait en esprit, les dates de parution étaient fantaisistes: "l'an de la liberté 0", "l'an de l'égalité en misère", etc. des caricatures illustraient les propos. Le ton n'était pas toujours léger, Mirabeau a eu droit à:

"A la hauteur où vous êtes, vos ennemis même conviennent que le gibet est le seul genre d'élévation qui vous manque"

Cette violence est à remettre dans le contexte de l'anarchie générale de l'ensemble de la presse à l'époque révolutionnaire, le journal reste cependant d'une grande qualité littéraire. Les Actes des Apôtres furent brûlés par la foule sur le parvis de Notre-Dame au printemps 1790, le libraire terrorisé dut renoncer à l'éditer. Bien que dénoncé plusieurs fois à la Commune, un certain désintéressement du public et les difficultés financières vinrent à bout des "Apôtres", en effet après avoir prêté serment à la Constitution le Roi ne versa plus l'allocation mensuelle. Lors de la fuite du roi à Varennes en juin 1791, un des envahisseurs des Tuileries, Nicolas Ruault, écrit à son frère: "J'ai vu sur une table des petits appartements plusieurs feuilles des Actes des Apôtres". Malheureusement ce journal par ses excès a souvent desservi la cause qu'il voulait défendre

En 1792 il fonde avec ses amis un nouveau journal Correspondance politique, puis sous son nom Nouvelle correspondance politique qu'il suspend à temps pour ne pas être atteint par les mesures de répressions réservées aux journaux "aristocrates".
C'est caché chez une "tendre amie" qu'il va vivre les journées d'août et septembre 1792, pendant les quelles 1.100 personnes furent massacrées dans les prisons de Paris. Le 21 septembre il prend le chemin de l'exil pour l'Angleterre.

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(1) La devise de ce Monsieur était: "A beau dard noble but", jeu de mot que Jean-Gabriel n'aurait pas renié...
(2) Le texte intégral des "Actes des Apôtres" peut être lu sur le site du Centre d'Histoire du droit de l'Université Rennes 1, publication par Y.-A. Durelle-Marc. Voir rubrique "Liens".